
Ce matin-là, ce n’était pas comme d’habitude. Pas de ces réveils mécaniques où l’on glisse un pied hors du lit avant même d’avoir compris que le jour est levé. Non. Ce matin, c’est le cœur qui m’a réveillé. Plein. Chargé. Il débordait d’un mélange de gratitude et de calme. J’ai ouvert les yeux et j’ai su que c’était un jour particulier. Un jour où quelque chose avait changé.
France 24 venait de diffuser, dans sa version française et anglaise, un reportage sur notre initiative. Je l’ai appris comme on reçoit un message longtemps attendu, sans trop y croire, mais avec l’intuition profonde que ça allait arriver. Et en cliquant sur le lien, juste là, posé dans le premier commentaire, j’ai regardé. J’ai écouté. Et je me suis regardé, d’un regard neuf.
J’ai vu notre travail, pas seulement à travers mes efforts ou mon engagement, non, mais avec ce recul qu’on n’a jamais vraiment sur ce qu’on construit au quotidien. Ce recul que seul le monde peut parfois nous offrir.

Et là, devant l’écran, je me suis dit : Oui, je fais de mon mieux. Oui, ça commence à porter. Oui, je trouve enfin mes repères.

J’ai toujours voulu être. Pas simplement paraître. Pas juste faire illusion. Il y a eu des jours sans sommeil, des moments de doute, des envies de jeter l’éponge… mais il y avait cette graine que je portais en moi. Je l’ai semée avec foi, sans bruit, sans promesse d’un retour rapide. Et aujourd’hui, voir l’écho que cela suscite, c’est comme entendre la terre me parler : Continue.

Ce reportage, c’est plus qu’un passage à la télévision. C’est une sorte de miroir. Une confirmation que les choses prennent forme, que l’énergie que je mets dans ce projet ne se dissout pas dans le vide. Et j’espère, du fond du cœur, que ceux qui m’ont toujours soutenu comprendront un peu mieux ce que je fais. Pas dans les grandes lignes. Mais dans l’intention. Dans le sens.

Je pense à ma mère. À ses mains trempées de sueur à force de préparer de la bouillie, juste pour que je puisse aller à l’école. À ses économies rangées dans un tissu, à ses silences pleins de courage. Je me dis : Peut-être qu’elle verra ce reportage, elle aussi. Et qu’elle saura. Que rien n’a été en vain. Que son fils ne court pas après du vent.

Cette lumière arrive à un moment presque parfait. À mes 27 ans. Ce chiffre n’a rien de symbolique pour beaucoup. Mais pour moi, il marque un tournant. Parce que cette année, j’ai cessé de me débattre avec moi-même. J’ai accepté qui je suis. J’ai compris pourquoi je fais tout cela. Et surtout, j’ai cessé de croire qu’il fallait être reconnu pour être utile.

Aujourd’hui, je sais que je suis utile. Je le ressens. Et c’est déjà immense.

Merci à l’équipe qui a porté cette histoire à l’écran.
Merci à ceux qui y croient.
Merci à ceux qui doutent mais restent.
Merci à ceux qui regardent, simplement, et comprennent.
Junior Deguenon
Avril 2025